L'électricité va devenir plus chère
Europe, loi Nome, concurrence, nucléaire
énergies renouvelables

Ce dossier d'information d'un sujet complexe, touche à tous les aspects de notre société: l'énergie et ses différentes formes d'utilisation et sources de production, l'énergie nucléaire, le producteur historique qu'est l'EDF, les énergies hydraulique et thermique, les énergies renouvelables, la recherche et le développement et l'avenir des énergies.

La loi "Nome" (nouvelle organisation du marché de l'électricité) votée au parlement le 7 novembre 2010, a pour objet de favoriser la concurrence tout en maintenant les spécificités françaises du marché de l'énergie électrique basé sur le nucléaire. Cette loi est le résultat de la privatisation des services voulue par la CE, du traité de l'Acte Unique et du Traité de Lisbonne. Ses détracteurs prétendent qu'elle est la voie ouverte à une hausse des tarifs de l'électricité 25-35% d'ici cinq ans. La loi Nome aura aussi des effets sur les modes de consommation de l'électricité et sur les modes de facturation aux particuliers - j'ai déjà eu des difficultés à comprendre ma facture en avril 2011; et EDF Bleu Ciel n'a pas pu me donner les explications non plus.

Avant d'entrer dans les détails de la loi Nome il faut comprendre comment fonctionnait le système de production, distribution et consommation d'électricité en France jusqu'alors (lien).

La loi Nome n'a pas pour objet la fixation des tarifs de l'électricité; mais elle crée un dispositif qui, sous le nom d'Accès Régulé au Nucléaire historique (Arenh), oblige EDF à vendre jusqu'à un quart de la production de ses centrales nucléaires à ses concurrents: GDF Suez, Poweo, Direct Energie, etc. lesquels ne parviennent pas jusque maintenant à s'implanter sur le marché de l'énergie, car l'énergie électrique produite et vendue aux français par EDF est trop bon marché. Une description historique est donnée dans le rapport du député Jean Claude Lenoir datant de mai 2010 (lien). Il faut lire notamment les auditions par la commission parlementaire, de Mr Philippe de Ladoucette président de la Commission de régulation de l'énergie CRE, d'Henri Proglio Président Directeur Général d'EDF et de Jean Louis Borloo alors ministre de l'écologie de l'énergie et du développement durable; j'ai extrait leurs interventions du rapport de Jean Claude Lenoir.

L'exposé des motifs de la loi présenté par le gouvernement en avril 2010, commence par "La France a fait le choix d’un bouquet énergétique tourné vers le nucléaire, une énergie compétitive et contribuant à la limitation des gaz à effet de serre. Elle a confié à EDF la mission de construire et d’exploiter à cette fin des centrales sur le territoire national. Il en a résulté des bénéfices importants pour les consommateurs français. L’enjeu du projet de loi Nome est d’en assurer la pérennité". (Voir ce lien sur l'exposé des motifs de la loi Nome). On pourrait préciser qu'en confiant à EDF le soin de construire et d’exploiter à cette fin - cad. produire de l'électricité - des centrales sur le territoire national, la France a choisi un système de production monopolistique, car jugée seule capable d'assurer les objectifs assignés.

Pour comprendre mieux la situation, lire l'article de Marcel Boiteux ex Directeur général de l'EDF (lien). Explications: dans une économie de marché à multiples entreprises, le prix de marché s'établit au coût de l'entreprise la moins performante afin que celle-ci avec toutes les entreprises présentes sur le marché puissent satisfaire la totalité de la demande. C'est particulièrement le cas du cuivre. Si on établit un graphique cumulatif production/coûts (lien) on trouve un très petit nombre d'entreprises - 20% - qui produisent en dessous 40% du prix de marché, un grand nombre d'entreprises 90% qui produisent à un coût inférieur à 90% du prix du marché; et la quasi totalité des entreprises qui produisent en dessous du prix du marché. Ce sont le petit nombre d'entreprises qui produisent à un coût inférieur à 60% du prix de marché qui font le plus de profit, ce qui leur permet de continuer les recherches afin de remplacer leur mine par une autre quand elle sera épuisée. En général les nouvelles mines sont moins riches; de sorte que l'ensemble des entreprises se décale vers des coûts plus élevés. Ce mouvement est renforcé quand la hausse de la demande et son excès par rapport à la production offerte augmentent le prix de marché. La hausse du prix incite les producteurs à mettre en perce de nouveaux gisements, lesquels sont plus coûteux à exploiter, ou d'autres producteurs à entrer sur le marché. La hausse du prix incite aussi à rechercher des progrès techniques ce qui permet de compenser l'évolution du prix à la hausse mais jusqu'à un certain point seulement.

Dans le cas de l'électricité en France, EDF a été jusqu'ici en position de monopole par un choix historique. Les tarifs étaient régulés et reflétaient les coûts économiques de production dans l'intérêt des consommateurs particuliers et entreprises. Avec l'instauration de la concurrence, le prix de marché met EDF dans la situation de l'entreprise la plus performante et lui confère une rente élevée, ceci à cause du nucléaire. En régime de concurrence, le prix de marché déterminé par le producteur le moins performant s'établit à 55-60€/Mwh alors que le tarif réglementé EDF en France est de 42€/Mwh. Il n'y a donc pas de concurrence possible si EDF vend son électricité en France au prix de 42€/Mwh soit environ 15-20€ en dessous du prix de marché. La loi Nome a pour objet d'obliger EDF à vendre jusqu'à 25% de sa production aux producteurs alternatifs au prix de 42€/Mwh ce qui les rendra compétitifs. Le dispositif est cependant transitoire et d'une durée de 15 ans afin de permettre aux producteurs alternatifs de mettre en oeuvre des moyens de production dont on espère qu'ils seront innovants et performants pour le bénéfice des consommateurs.

Mis à jour le 09/07/2013